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Appel
Date limite de soumission : samedi 1er mars 2025
6e Rencontres du 19e siècle, les 4 et 5 juin 2025 à Clermont-Ferrand, avec le soutien du Centre d’Histoire « Espaces et Cultures » (Université Clermont Auvergne) et de la Société d’Histoire de la Révolution de 1848. La leçon inaugurale sera prononcée par David Todd, professeur d’histoire contemporaine à Sciences Po Paris.
Depuis 2019, en partenariat avec la Société d’histoire de la révolution de 1848 et des révolutions du XIXe siècle, les Rencontres du XIXe siècle réunissent des jeunes chercheuses et chercheurs, issu.e.s de différentes universités et appartenant à divers champs historiographiques, pour discuter d’une notion spécifique. Après « Petites et Grandes Rencontres » (Paris, 2019), « Populaire » (Toulouse, 2021), « Nature » (Dijon, 2022), « Progrès » (Lille, 2023) et « Révolution[S] » (Le Mans, 2024),
L’Empire contre-attaque ! Le long XIXe siècle compris entre la Révolution française et la conférence de paix à Versailles (1919) est incontestablement celui de l’affirmation des nations. Pourtant, le renouveau historiographique montre qu’il est aussi celui d’une profonde redéfinition des empires (Singaravélou et Venayre, 2017 ; Todd, 2021 ; Félicité, 2024). Multi ou plurinationaux, continentaux ou coloniaux, les empires ont façonné l’histoire du dernier tiers du siècle (Hobsbawm, 1987) en déployant, sur tous les continents, leur hégémonie politique, économique et culturelle. Les empires peuvent ainsi être définis comme étant de « vastes unités politiques, expansionnistes ou conservant le souvenir d’un pouvoir étendu dans l’espace, qui maintiennent la distinction et la hiérarchie à mesure qu’elles incorporent de nouvelles populations » (Burbank et Cooper, 2010). Ces unités politiques reposent sur des relations politiques inégalitaires entre un centre dominateur et des « périphéries » subalternes (Doyle, 1986), dualité qui recouvre en fait des réalités plus complexes. Au-delà de ces points communs, les empires du XIXe siècle recouvrent des formes diverses et soulèvent une myriade d’enjeux que cherchent à aborder ces Rencontres.
Empires au pluriel. La pluralité dans l’impérialité se manifeste notamment à travers ce que Burbank et Cooper ont appelé les « répertoires impériaux », c’est-à-dire les différentes façons dont les empires, y compris continentaux et non occidentaux, ont institué et organisé leur pouvoir, des conquêtes territoriales à proprement parler aux formes plus informelles de la domination (Todd, 2021). De même, les différents empires du XIXe siècle ne se sont pas déployés en vase clos, mais en constante interaction avec d’autres entités politiques, nationales ou impériales (Bayly, 2004). Si les rivalités inter-impériales ont été un moteur important de ce siècle, menant jusqu’à l’affrontement généralisé, il ne faudrait pas passer sous silence les moments de coopération trans-impériale et les circulations de modèles répressifs, notamment lorsqu’il fallut réprimer les mouvements nationaux qui menaçaient les équilibres géopolitiques (Fabre 2024). Cela amène à poser la question des transferts culturels, des imaginaires partagés et de la circulation des savoirs : du modèle réactionnaire de Metternich au racialisme du High imperialism. Ces dynamiques impériales, loin d’être homogènes, se retrouvent également dans les relations complexes entre empires et environnements.
La main verte des empires. Les empires sont aussi le cadre d’importantes circulations de marchandises. La situation impériale des puissances européennes leur permet de drainer dans leurs possessions coloniales des ressources essentielles à leur production industrielle (Pomeranz, 2010), dans le cadre de ce qui est désormais qualifié dans l’historiographie d’échange écologique inégal (Hornborg, 2013). Par ailleurs, dans le sillage des travaux d’Alfred Crosby sur l’impérialisme écologique (1986), les historiens de l’environnement s’intéressent aux politiques d’exploitations de la nature mises en place dans les espaces impériaux, par exemple par le biais de parcs naturels (Blanc, 2020) ou de jardins botaniques (Blais, 2023). L’histoire environnementale permet ainsi de mieux saisir les relations de pouvoir, de domination et de réification qui caractérisent les empires et qui touchent tant les populations colonisées que les territoires conquis.
Les empires et leurs acteur.rice.s. Les entités impériales, tout comme les États de manière plus générale, reposent en grande partie sur des individus qui agissent tels des intermédiaires entre leurs différentes composantes sociales, culturelles, géographiques et politiques. Le rôle des acteurs et actrices de ces formations politiques est crucial. Il s’agit des dirigeants politiques bien sûr, du centre impérial ou de ses possessions, mais aussi de cette « bourgeoisie globale » (Dejung, Motadel et Osterhammel, 2019), métropolitaine comme coloniale, base sociale de cette forme d’organisation tant politique qu’économique. De même, les forces centrifuges au sein de ces empires, c’est-à-dire celles qui en refusent le joug et qui cherchent à s’en extraire, participent également à cette dynamique, en délitant le pouvoir impérial ou, au contraire, en le renforçant malgré elles (Colantonio et Jahan, 2017). Pensons à la Grande révolte des esclaves de Jamaïque en 1831-32, à la résistance algérienne menée par l’émir Abdelkader, à la révolte des cipayes de 1857 dans l’Inde britannique, de même qu’aux mouvements nationalistes des empires continentaux européens. Qui sont ces acteurs (anti-)impérialistes ? Quelles sont leurs motivations, leurs moyens d’action ? Que peut nous apprendre une histoire sociale des empires sur cette forme d’organisation politique ?
Être d’empire, subir l’empire ? En renouvelant les sentiments d’appartenance (territoriale, nationale, impériale, religieuse, etc.), les empires ont aussi transformé les manières de se percevoir, de sentir et de consommer. S’ils sont discutés à l’échelle internationale et nationale, s’ils ont des effets institutionnels ou juridiques, les empires ont aussi façonné la norme quotidienne jusqu’au petit-déjeuner, par l’intermédiaire de la presse, des expositions, de l’architecture, des objets de consommation, et de l’alimentation (Singaravélou et Venayre, 2020 et 2022). Aussi penser les empires à partir de la norme et de l’infra-norme permet de comprendre leur pénétration dans les systèmes de représentation (Kalifa, 2009) et leurs traductions en termes de pratiques politiques ou culturelles jusqu’à l’échelle de l’individu. Ainsi, quelle que soit sa forme, l’empire a participé à façonner les imaginaires sociaux et par ricochet les cultures et les sentiments d’appartenance à des « communautés imaginées » (Anderson, 1983). Le comité scientifique des Rencontres saura porter attention aux propositions relatives à l’étude de ces imaginaires, des représentations et des pratiques individuelles.
D’Empire en pire. La notion d’empire porte avec elle un ensemble de violences et de conflictualités qui lui sont spécifiques. Qu’il s’agisse de soumettre politiquement ou de conquérir militairement, les constructions impériales ont porté avec elles un ensemble de rapports de force et de violences. Au-delà du moment de leur construction, les empires, fondés sur des rapports de domination territoriale, politique, économique, raciale et sociale sont sources de conflictualités systémiques qu’il serait pertinent de mettre en exergue et d’interroger. La réalité du travail contraint au XIXe siècle et la persistance de certaines formes d’esclavage dans les espaces coloniaux (Stanziani, 2020) illustrent cette différenciation au cœur du projet impérial. Ces conflictualités et violences impériales, quelles que soient leur forme, ont participé à façonner les modalités des relations entre les autorités et les populations. En outre, elles externalisent les guerres européennes au XIXe siècle (Venayre, 2023) et ont pu se manifester au sein des relations inter-personnelles. À ce titre, le comité scientifique des Rencontres sera particulièrement attentif aux propositions s’intéressant aux vécus intimes et concrets des individus (relevant par exemple de la micro-histoire). Nous souhaitons en somme, durant ces rencontres, varier les échelles d’analyse, depuis les questions macro-politiques et économiques jusqu’à une histoire sociale fine des rapports de pouvoir dans les empires. Les propositions explorant les questions de genre, de race, de dynamiques religieuses, ou d’autres formes de hiérarchies au sein des empires sont également encouragées. Enfin, il sera intéressant de porter attention aux circulations des répertoires de violence entre les sphères coloniale et métropolitaine jusqu’au paroxysme de la Grande guerre.
Nous rappelons que ces Rencontres sont destinées en priorité aux jeunes chercheuses et chercheurs, des doctorant.e.s de première année aux post-doctorant.e.s. L’ambition de cette manifestation est de favoriser la rencontre et le dialogue entre doctorant.e.s et jeunes docteur.e.s. La diversité des thèmes envisagés doit permettre un large panel de communications. Les propositions peuvent donc porter sur tout type de contexte, local, colonial et/ou national et sont invitées à explorer un ou plusieurs des axes évoqués dans cet appel.
Modalités de soumission :
Les propositions de communication (en français ou en anglais, de 2 000 signes maximum) devront être envoyées à rencontres19eme chez gmail.com avant le 1er mars 2025, accompagnées d’un court CV.
Ces Rencontres des jeunes dix-neuviémistes se tiendront à la Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand, avec le soutien du CHEC et de la Société d’Histoire de la Révolution de 1848. Le logement (dans la mesure du possible) et deux repas seront pris en charge par l’organisation, mais les frais de déplacement seront à la charge des participant.e.s et/ou de leur laboratoire de rattachement.
Comité scientifique et d’organisation :
· Chloé Chatrian (Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
· Marie Clemenceau (Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
· Étienne Hudon (Université Paris Cité / UQÀM)
· Thibault Montbazet (agrégé d’histoire)
· Pierre-Louis Poyau (Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
· François Robinet (Université Clermont Auvergne / Université Savoie Mont Blanc)
· Karl Zimmer (Le Mans université)
Colloque
4-5 juin 2025 (Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand)
Page créée le mardi 3 décembre 2024, par Webmestre.