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Colloque
Du 30 novembre 2023 au 1er décembre 2023
Colloque organisé par l’Institut François Mitterrand et la Société française d’histoire politique ; avec le soutien de l’Académie des sciences d’Outre-mer et du laboratoire Intégration et Coopération dans l’Espace Européen (ICEE)
Inscription gratuite obligatoire avant le 29 novembre 2023 : https://www.helloasso.com/associations/institut-francois-mitterrand/evenements/colloque-francois-mitterrand-itineraires-africains-avant-la-ve-republique
La politique africaine du président François Mitterrand est le plus souvent étudiée par rapport à celle de ses prédécesseurs à l’Élysée. La focale se porte volontiers sur l’actualité africaine de la fin du septennat de Valéry Giscard d’Estaing, avec le regain de la Guerre froide et des interventions militaires françaises, et sur la matrice gaullienne de la coopération franco-africaine à la suite des indépendances. La grille de lecture continuité/rupture – qui a sa pertinence – ne doit cependant pas faire oublier que les connaissances et les réflexions de François Mitterrand sur l’Afrique ne sont pas nées avec son accession à la présidence de la République en 1981 ni même avec la Ve République en 1958. La rencontre de François Mitterrand avec le continent africain, du moins avec ses territoires français, est antérieure et peut se situer, au-delà de la connaissance commune autour d’une France impériale, au seuil des années 1950 sous la IVe République1.
C’est au sein de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR) que le député François Mitterrand se familiarise avec les questions africaines au moment où le processus de décolonisation secoue l’Union française. Avec l’autre grand leader de ce parti-charnière des majorités parlementaires, René Pleven, il est l’artisan, en octobre 1950, du désapparentement du Rassemblement démocratique africain (RDA) avec le Parti communiste français, et de son alliance avec l’UDSR. Au-delà des calculs politiques propres à un régime d’assemblée, cet arrimage du RDA et de son charismatique leader, l’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny, à la République française s’avère fondamental. Jusqu’alors traité comme un parti menaçant l’intégrité de l’Union française par l’administration coloniale, le RDA devient, aux côtés de l’UDSR de François Mitterrand, une formation-clé des élus ultramarins au Parlement et plus généralement dans la vie politique française.
Cet événement majeur ouvre les voies à une évolution pacifique de l’AOF et de l’AEF vers les indépendances, même si l’objectif n’est pas alors celui-là. Cela pose également François Mitterrand sur la scène franco-africaine comme l’un des leaders de l’aile « libérale » qui entend promouvoir des évolutions pacifiques dans les territoires africains – plus de participation politique des Africains et développement économique et social – au sein d’un grand ensemble français voire, un jour, franco-africain. Ses positions, tant en Afrique subsaharienne que par rapport à l’évolution des protectorats du Maroc et de la Tunisie, lui valent déjà de fortes oppositions, en particulier de la part du Rassemblement du peuple français (RPF) du général de Gaulle, gardien vigilant de l’empire.
De juillet 1950 à août 1951, François Mitterrand a l’occasion de mettre en application ses conceptions en tant que ministre de la France d’Outre-mer dans les gouvernements de René Pleven (I) et Henri Queuille (III). Son passage rue Oudinot est essentiel car il fait de lui, au-delà des arcanes des assemblées parlementaires, un spécialiste des questions ultramarines. Celles-ci constituent même, au cours des années suivantes et au gré de ses différents postes ministériels, sous les gouvernements d’Edgar Faure (I), Pierre Mendès France puis Guy Mollet, l’un des fils conducteurs de son engagement politique qui l’ancre de plus en plus au centre gauche de l’échiquier politique. Lorsqu’au milieu des années 1950, la nécessité de réformer le titre VIII de la Constitution (« De l’Union française ») se fait plus impérieuse, compte tenu de l’évolution des revendications nationalistes africaines, il s’investit pleinement dans ce débat qui engage alors l’avenir de la République française. Il publie deux ouvrages sur ce sujet : en 1953, Aux frontières de l’Union française. Indochine-Tunisie, et surtout en 1957, Présence française et abandon. François Mitterrand s’y fait, comme au sein de l’Assemblée nationale, le chantre d’une « Communauté fédérale (…) des plaines de Flandre aux forêts de l’équateur » organisée autour d’« un pouvoir centralisé fortement structuré à Paris ». Le 4 février 1958, il dépose en ce sens un projet de résolution prévoyant la création d’une « Communauté franco-africaine ». Conscient de la poussée des nationalismes africains, il espère pouvoir trouver les formules juridiques permettant de faire adhérer les élites africaines au maintien d’un grand ensemble franco-africain à vocation fédérale.
C’est bien dans cette conception d’ensemble qu’il analyse, dès le début des années 1950, la question du devenir du Maroc et de la Tunisie. Opposé à la politique de force, il se montre partisan de solutions permettant la pérennisation des liens entre la France et ses protectorats sous des formes politico-institutionnelles renouvelées. Sur l’Algérie, en revanche, il donne à voir un autre visage. Comme ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Pierre Mendès France, il participe, à la suite de la « Toussaint rouge », à la répression des mouvements nationalistes algériens, de même qu’en tant que Garde des Sceaux du gouvernement de Guy Mollet. Ce qui ne l’empêche pas de réclamer une solution avant tout politique au conflit qui passe d’abord, selon lui, par de profondes réformes économiques et sociales en faveur des populations algériennes.
Le colloque entend revenir sur ces aspects moins connus de la vie politique de François Mitterrand. Il s’agira d’analyser ses conceptions politiques ultramarines, libérales pour l’époque, qui appellent à des évolutions progressives et mutuellement profitables. Des options politiques fortes qui lui valurent de violentes oppositions et des tentatives de déstabilisation comme « l’affaire des fuites ». Pour autant, ce libéralisme n’admettait pas encore l’indépendance des territoires de l’Union française et laissa place à l’option répressive dans la guerre d’Algérie.
Ce faisant, il s’agira de comprendre en quoi François Mitterrand est représentatif de générations politiques qui croyaient à la « plus grande France » et de quelle manière il participa au maintien d’un grand ensemble franco-africain centré autour de la France et intégré à l’Europe en voie de construction. Ce colloque sera enfin l’occasion de réévaluer la place de l’Afrique dans l’itinéraire politique de François Mitterrand, d’analyser les réseaux qu’il construisit à cette occasion, et la façon dont il conjugua intérêts politiques, impératif de puissance et sens de l’État. Cette expérience inaugurale et sans doute matricielle ne saurait être ignorée dès lors que l’on s’intéresse à la politique africaine du leader de la gauche et du président de la République dans la période post-coloniale.
Inscriptions : gratuites obligatoire avant le 29 novembre 2023 sur HelloAsso.
Programme
Jeudi 30 novembre 2023
9h30 - Ouverture
Mot d’accueil : Frédéric Bozo, président du Conseil scientifique de l’Institut François Mitterrand, et Gilles Richard, président de la Société française d’histoire politique.
Présentation du colloque : Anne-Laure Ollivier.
10h00 - Hommes et réseaux au temps de la France impériale
Présidence : Gilles Richard
Éric Roussel (Institut de France), L’Afrique et la IVe République dans la carrière de François Mitterrand.
Judith Bonnin (Université Bordeaux Montaigne), Les premiers voyages africains de François Mitterrand.
Anne-Laure Ollivier (CPGE), François, Gaston, Alain et les autres « libéraux » en matière coloniale.
Julien Hélary (Académie de Strasbourg), François Mitterrand et les administrateurs de la FOM.
14h00 - Quelle politique pour quel territoire ?
Présidence : Christine Manigand
Vincent Joly (Université Rennes 2), François Mitterrand et la Côte d’Ivoire.
Jacques Frémeaux (Académie des sciences d’Outre-mer), François Mitterrand et l’Algérie.
Pierre Vermeren (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), François Mitterrand et le Maroc.
Jérémy Guedj (Université Côte d’Azur), François Mitterrand et la Tunisie.
Frédéric Fogacci (Fondation Charles de Gaulle), François Mitterrand et les radicaux.
Vendredi 1er décembre 2023
9h00 - Des réformes pour quel avenir ?
Présidence : Noëlline Castagnez
Fabien Bartolotti (Université Aix-Marseille), François Mitterrand et le développement industrialo-portuaire de l’Afrique coloniale.
Thomas Leyris (Université de Lille), François Mitterrand et la radiodiffusion outre-mer.
Yves Montarsolo (CPGE lycée Saint-Exupéry, Marseille), François Mitterrand et l’idée d’Eurafrique.
Frédéric Turpin (Université Savoie Mont-Blanc / Académie des sciences d’Outre-mer), François Mitterrand et l’idée de Communauté franco-africaine.
14h00 - François Mitterrand, l’Afrique et le jeu politique métropolitain
Présidence : Jenny Raflik-Grenouilleau
Christian Bougeard (Université de Bretagne Occidentale), François Mitterrand, René Pleven et l’Afrique.
François Audigier (Université de Lorraine), François Mitterrand et l’Afrique face aux gaullistes.
Gilles Richard (Université Rennes 2 / Société française d’histoire politique), François Mitterrand et le Rassemblement démocratique africain (RDA).
Conclusions : Frédéric Turpin.
Membres du comité de pilotage
Frédéric Turpin, professeur à l’Université Savoie Mont-Blanc
Frédéric Bozo, professeur à l’Université Sorbonne Nouvelle
Noëlline Castagnez, professeure à l’Université d’Orléans
Anne-Laure Ollivier, professeure en CPGE littéraires
Jenny Raflik-Grenouilleau, professeure à l’Université de Nantes
Sébastien Repaire, responsable des activités scientifiques - IFM
Gilles Richard, professeur émérite à l’Université Rennes 2
Notes
1 Parmi les nombreux biographes de François Mitterrand, Éric Duhamel est l’un de ceux qui se sont le plus intéressés à cette dimension. Voir : Éric Duhamel, François Mitterrand. L’unité d’un homme, Paris, Flammarion, 1998.
2 François Mitterrand, Présence française et abandon, Paris, Plon, 1957, p. 237.
(Re)Lire / Écouter / Voir
Mercredi 8 janvier 2025
Présentation de l’ouvrage
François Mitterrand « l’Africain » n’est pas né avec son accession à la présidence de la République en 1981, ni même avec la Ve République du général de Gaulle en 1958. Sa rencontre avec le continent africain date de la IVe République, au seuil des années 1950. Issu d’un colloque organisé par l’Institut François Mitterrand et la Société française d’histoire politique, cet ouvrage est l’occasion de réévaluer la place de l’Afrique dans l’itinéraire politique de François Mitterrand, d’analyser les réseaux qu’il construit à cette occasion, et la façon dont il conjugue convictions, intérêts politiques, impératif de puissance et sens de l’État. Cette expérience inaugurale et sans doute matricielle ne saurait être ignorée dès lors que l’on s’intéresse à la politique africaine du leader de la gauche et du président de la République dans la période post-coloniale.
L’ouvrage contient, en outre, un texte inédit de François Mitterrand dans une édition critique de Judith Bonnin
Co-directeurs
Agrégée d’histoire et docteure en histoire contemporaine, Anne-Laure Ollivier enseigne en classes préparatoires littéraires. Chercheuse associée au laboratoire POLEN (POuvoirs, LEttres, Normes, EA 4710), elle a notamment codirigé (avec François Dubasque) Le promeneur enraciné. François Mitterrand, un cheminement politique et sensible à travers les territoires, Rennes, PUR, 2023.
Professeur d’histoire contemporaine à l’Université Savoie Mont Blanc, Frédéric Turpin est membre du laboratoire CERDAF (Centre de recherche en droit Antoine Favre, EA4143). Il est notamment l’auteur de Pierre Messmer. Le dernier gaulliste (Paris, Perrin, 2020), La France et la francophonie politique. Histoire d’un ralliement difficile (Paris, Les Indes savantes, 2018), Jacques Foccart. Dans l’ombre du pouvoir (Paris, CNRS Éditions, 2015/ rééd. 2021) et De Gaulle, Pompidou et /’Afrique. Décoloniser et coopérer. 1958-1974 (Paris, Les Indes savantes, 2010).
La collection « Institut François Mitterrand » se fixe pour objectif de diffuser la recherche scientifique portant sur la vie et l’action de François Mitterrand (1916-1996), ainsi que sur les « Années Mitterrand » (1981-1995), dans un cadre tant national qu’européen et international. Placée sous l’égide du Conseil scientifique de l’Institut François Mitterrand, la collection est coordonnée par Frédéric Bozo, Nicolas Leron et Sébastien Repaire.
Table des matières
INTRODUCTION [ANNE-LAURE OLLIVIER]
PREMIÈRE PARTIE
HOMMES ET RÉSEAUX AU TEMPS DE LA FRANCE IMPÉRIALE
L’AFRIQUE ET LA IV° RÉPUBLIQUE DANS LA CARRIÈRE DE FRANÇOIS MITTERRAND [ÉRIC ROUSSEL]
LES PREMIERS VOYAGES AFRICAINS DE FRANÇOIS MITTERRAND (1943-1950) [JUDITH BONNIN]
FRANÇOIS, GASTON, ALAIN ET LES AUTRES : ÊTRE « LIBÉRAL » EN MATIÈRE COLONIALE SOUS LA IV° RÉPUBLIQUE [ANNE-LAURE OLLIVIER]
FRANÇOIS MITTERRAND ET L’ADMINISTRATION COLONIALE AVANT LA V° RÉPUBLIQUE [JULIEN HÉLARY]
DEUXIÈME PARTIE
QUELLE POLITIQUE POUR QUEL TERRITOIRE ?
FRANÇOIS MITTERRAND : D’UNE CERTAINE ALGÉRIE PRANÇAISE À L’ANTIGAULLISME [JACQUES FRÉMEAUX]
FRANÇOIS MITTERRAND ET LE MAROC SOUS LA IV° RÉPUBLIQUE [PIERRE VERMEREN]
FRANÇOIS MITTERRAND ET LA TUNISIE SOUS LA IV° RÉPUBLIQUE [JÉRÉMY GUEDJ]
TROISIÈME PARTIE
DES RÉFORMES POUR QUEL AVENIR ?
FRANÇOIS MITTERRAND ET LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE L’UNION FRANÇAISE : LE CAS DES PORTS OUEST-AFRICAINS AU DÉBUT DES ANNÉES 1950 [FABIEN BARTOLOTTI]
FRANÇOIS MITTERRAND ET LA RADIODIFFUSION D’OUTRE-MER, LES APPORTS D’UNE APPROCHE CONTREFACTUELLE [THOMAS LEYRIS]
FRANÇOIS MITTERRAND ET L’IDÉE D’EURAFRIQUE [YVES MONTARSOLO]
FRANÇOIS MITTERRAND ET L’IDÉE DE COMMUNAUTÉ FRANCO-AFRICAINE : ENTRE NÉCESSITÉ, URGENCE ET ESPOIR [FRÉDÉRIC TURPIN]
QUATRIÈME PARTIE
FRANÇOIS MITTERRAND, L’AFRIQUE ET LE JEU POLITIQUE MÉTROPOLITAIN
RENÉ PLEVEN, FRANÇOIS MITTERRAND ET L’AFRIQUE SOUS LA IV° RÉPUBLIQUE [CHRISTIAN BOUGEARD]
POURQUOI CONSTRUIRE LA « COMMUNAUTÉ FRANCO-AFRICAINE » ? FRANÇOIS MITTERRAND ET LE RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE AFRICAIN DE 1950 À I958 [GILLES RICHARD]
UN JEU À SOMME NULLE : FRANÇOIS MITTERRAND, LES RADICAUX ET L’AFRIQUE [FRÉDÉRIC FOGACCI]
UN RÉQUISITOIRE VIRULENT : LES GAULLISTES DU RPF FACE AU MINISTRE DE LA FRANCE D’OUTRE-MER FRANÇOIS MITTERRAND [FRANÇOIS AUDIGIER]
CONCLUSIONS [FRÉDÉRIC TURPIN]
DOCUMENT INÉDIT
JOURNAL DE VOYAGE EN AFRIQUE NOIRE (JANVIER-FÉVRIER 1950)
AUX ORIGINES DE LA RENCONTRE ENTRE FRANÇOIS MITTERRAND ET L’AFRIQUE : UNE NOUVELLE SOURCE [JUDITH BONNIN]
FRANÇOIS MITTERRAND, « JOURNAL DE VOYAGE EN AFRIQUE NOIRE (JANVIER-FÉVRIER 1950) » [ÉDITION CRITIQUE ÉTABLIE PAR JUDITH BONNIN]
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