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Appel à communications pour les Journées d’étude du programme de recherche Mediterranean Reconfigurations ConfigMed – European Research Council – Advanced Grant n° 295868 : « Éléments de preuve et litiges commerciaux en Méditerranée (XVe-XIXe siècle) »

- Elements of proof and commercial litigations in the Mediterranean (15th-19th century)
- Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, salle Marc Bloch, 18-20 juin 2015

Que nous apprennent les artéfacts probatoires produits pour régler les litiges commerciaux au sujet de la configuration juridique de la Méditerranée entre les XVe et XIXe siècles ?

Depuis 2012, le programme de recherche Mediterranean Reconfigurations (ConfigMed) s’attache à étudier à nouveaux frais les litiges commerciaux, le pluralisme juridique et le commerce interculturel en Méditerranée, à la croisée de traditions, de régimes et de référents juridiques divers. Dans ce cadre, la méthode choisie prévoit d’aborder les conflits impliquant des acteurs économiques venus d’Europe, de l’empire ottoman et du Maghreb, ainsi que les rencontres, les compromis et les éventuelles contaminations.

Les systèmes de preuve des principaux régimes juridiques de l’Antiquité à l’époque contemporaine ont donné lieu à plusieurs enquêtes ainsi qu’à une grande série de publications entre la fin des années 1950 et le début de la décennie suivante, soit dans un contexte où les empires coloniaux finissants découvraient, ou redécouvraient, les fondements de théories légales autochtones, appelées jouer un rôle essentiel au moment des indépendances.

Ces journées d’étude ambitionnent de poursuivre ces travaux et ces réflexions en mettant tout particulièrement l’accent sur la production et la circulation des éléments de preuve en Méditerranée. En partant de l’examen des certificats, des attestations et des déclarations, on tâchera d’examiner leurs effets, tant sur le monde des affaires que sur des systèmes juridiques souvent pensés comme étanches.

L’un des axes structurants de ce workshop procédera à l’analyse des procédures du règlement des litiges à travers la production et la circulation de certificats et d’attestations. Les origines, la diversité formelle, la matérialité et les logiques de ces artéfacts devraient être à même de fournir des éléments de réflexion quant à la nature et la résolution des disputes, ainsi qu’au fonctionnement concret des institutions, telles que les consulats et les tribunaux de commerce. Une attention particulière devant être portée aux affaires impliquant des agents d’horizons différents (litiges avec l’infidèle, conflits entre étrangers et ceux opposant locaux et gens de passage) ; on s’attachera aux modalités et aux limites de l’accès à la justice pour les différents acteurs (les Musulmans, par exemple, fréquentaient-ils les cours européennes ?), ainsi qu’aux logiques et aux pratiques d’intermédiation rendues nécessaires par la présentation des éléments probatoires.

Notre réflexion repose sur les acquis de recherches récentes, comme celles consacrées aux procédures de « justice sommaire », mise à la disposition des étrangers et marchands en Europe, ou, en terre d’islam, à des doctrines (Siyasah) et des pratiques de justice administré par le souverain en lieu et place des qâdîs, comme le recours des étrangers au Divan ottoman. Le projet consiste à étudier les procédures au ras des archives, à travers les pratiques et la circulation des pièces. Il ne s’agit donc pas de s’intéresser en soi aux systèmes juridico-philosophiques d’une "civilisation" ou d’"aires culturelles" rarement définies de manière empirique, mais plutôt de réfléchir aux relations socio-culturelles suscitées par les litiges commerciaux, ainsi qu’aux enjeux suscités par la coexistence ou la compénétration de
logiques probatoires différentes.

La rencontre vise à surmonter la vision d’une Méditerranée réduite à l’opposition stricte entre un système de preuve Islamique - éminemment oral et structuré par les contraintes formalistes de la loi divine - et un régime probatoire occidental radicalement différent et orienté vers une Rationalisierung toute wébérienne, marqué par le triomphe de l’écrit et la notarisation du droit moderne. Ceci passera nécessairement par l’examen attentif de la circulation et l’usage des preuves, par la reconstitution des chaînes d’écriture et de réécriture entre litigants, intermédiaires et institutions productrices ou utilisatrices d’éléments probatoires. Cette démarche devrait produire matière à discuter la pertinence des frontières habituellement tracées entre des univers qui s’avèrent être poreux, telles que celles opposant l’oral et l’écrit, le privé et le public. Par exemple, la pratique judiciaire ottomane aurait mis en place des procédés de validation et de certification des actes privés à la valeur similaire aux attestations produites par l’autorité publique du notaire latin. De surcroît, il s’agira de dépasser une analyse des éléments de preuve les réduisant à leurs fonctions et fins originelles – véhiculer la vérité sur les faits – pour les interpréter pleinement comme des outils de la pensée. L’aspect formel des preuves, leurs logiques de composition et de communication, la rhétorique utilisée, leur(s) langue(s) et tout signe extérieur de validité pourront être mis à contribution afin d’évaluer, sous une lumière nouvelle, la texture des cultures juridiques d’époques, de territoires et de groupes sociaux différenciés. En considérant les pièces probatoires comme des médias, le workshop abordera le rôle de la preuve dans l’analyse des processus de communication et l’interprétera comme un scénario privilégié de créativité légale et culturelle dans un espace transméditerranéen formé par et pour la résolution des litiges commerciaux.

Axes thématiques :

- A quel moment de la procédure survient la présentation et l’examen des preuves et sur quels critères sont-elles évaluées ? Quels sont alors les effets de cette présentation sur l’issue du litige ?

- Les preuves sollicitées au cours de litiges d’ordre commercial sont-elles spécifiques au monde du commerce méditerranéen ou proviennent-elles d’autres systèmes juridiques et/ou culturels méditerranéen ou extra-méditerranéen ? Est-il alors possible de lier les modalités de résolution des litiges commerciaux à d’autres problèmes, telles que les sollicitations pour restitution des marchandises prises par des corsaires ?

- La matérialité, la nature et les fonctions de ces instruments sont-elles relatives à des espaces, à des institutions ou à des types de procédures particuliers ?

- Par-delà les classifications formelles habituelles, quelles différences est-il possible de faire entre les différentes pièces jointes aux procès ? Existe-t-il en Méditerranée un type de documentation davantage mobilisé que les autres pour obtenir gain de cause lors d’un litige commercial ?

- Quelle est la place des actes sous seing privé dans la résolution de ces litiges ? Sous quelles conditions, juridiques, politiques et religieuses notamment, et dans quels contextes particuliers revêtent-ils le plus d’importance pour les acteurs ?

- L’étude des procédures à partir des éléments probatoires confirme-t-elle l’hypothèse selon laquelle les tribunaux marchands auraient eu une approche plus souple que d’autres cours vis-à-vis de la preuve écrite ?

- En cas de confrontation entre plusieurs régimes probatoires, de quelle manière l’institution régulatrice décide-t-elle de la valeur des pièces qui lui sont présentées ?

- Existe-t-il alors des régimes mixtes qui reposeraient, de manière pérenne ou ponctuelle, sur l’articulation d’éléments probatoires différents, voire sur leur hybridation ?

- Quels sont les processus de validation des éléments de preuve ? Et que disent-ils du fonctionnement des institutions, des effets des procédures, ainsi que de la culture juridique des acteurs ?

- Quelles sont les principales institutions émettrices de certificats et d’attestations en tous genres ?

- Des schémas particuliers apparaissent-ils dans la sollicitation de ces institutions par les acteurs ? Et quelles sont les logiques de communication prévues par les procédures, ou qui se trouvent définies par la circulation des pièces elles-mêmes ?

Modalités pratiques d’envoi des propositions

Les propositions, de 1000 signes maximum, sont à adresser à Wolfgang Kaiser : wolfgang.kaiser chez univ-paris1.fr avant le 29 mars 2015

La sélection des propositions sera réalisée par le directeur du programme Wolfgang Kaiser et les organisateurs :

- Francisco Apellániz,
- Yavúz Aykan,
- Wolfgang Kaiser,
- Johann Petitjean

Contacts
- Wolfgang Kaiser : courriel : wolfgang [dot] kaiser [at] univ-paris1 [dot] fr
- Johann Petitjean : courriel : petitjean [dot] johann [at] gmail [dot] com

Annonce from http://calenda.org/321377


Page créée le jeudi 26 mars 2015, par Dominique Taurisson-Mouret.


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